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Alya HAMZA , 16 Apr 2015 08:53
Voulez-vous rire avec moi ?
Voulez-vous rire avec moi ?


Rien de plus ludique, joyeux et jubilatoire que les expositions de cette artiste au talent aussi exacerbé que son sens de l’humour.
En dépit de nos tentatives toujours curieuses, Aïcha Filali  n’accepte jamais de dévoiler le thème de ce à quoi elle travaille. Et en dépit de la frustration toujours renouvelée de ne pas être dans le secret des dieux, elle a raison, car la surprise est une part importante du plaisir.
Galerie Aïcha Gorgi, où elle nous avait déjà présenté ses écrans de télévision factices, ses paravents de personnages de rues, ses sièges où l’on s’assoit sur les grandes scènes de l’Histoire de la Tunisie, ses mariages en trois D, et autres talentueuses facéties, on la retrouve cette semaine avec ses ANA/CHRONIQUES.
 Etonnante façon de raconter la Tunisie d’aujourd’hui à travers des montages photos retravaillés, qui mêlent allègrement imageries anciennes et reportages d’actualité. Adoptant les techniques d’imageries populaires qui mettent sur un même plan, sans structure ni linéarité, tous les éléments du récit qu’elle propose, alternant icônes de l’art indien ou persan de la miniature, avec des personnages célèbres ou inconnus de notre quotidien, n’hésitant pas à glisser des vedettes du spectacle ou de la télévision dans ses recompositions, Aïcha Filali s’amuse, et nous amuse.
Dans son «Université», les étudiants, voilés ou en cheveux, n’occupent que les marges, la place étant envahie par des scribes médiévaux chez qui le kalam remplace l’ordinateur. Pour son «Mariage», un palanquin porté par un chameau conduit une princesse des Mille et une Nuits vers un époux en costume et cravate, cependant que des odalisques dansent sur les chansons d’une diva plantureuse et décolletée. «Elections» représente des dignitaires à genoux, suppliant probablement qu’on les élise, sous l’objectif d’un reporter, cependant que des urnes jaillissent….une multitude de lapins. A «Carthage», devant une escouade de chameaux, et devant un bataillon de janissaires et de gardes républicains, arme au clair, un dignitaire en burnous quitte le palais sous le regard d’un sultan digne du feuilleton, grandiose et majestueux. Et pour «Festival», on reconnait Aïcha Filali elle-même en guitariste de rock, avouant peut-être un fantasme caché.
Alors peut-être que ce n’est pas exactement ce qu’a voulu transcrire Aïcha Filali, mais c’est ce que j’y ai trouvé, et le plus beau de l’histoire, c’est que chacun y trouvera ce que porte son regard.
Source : La Presse